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Feuille de route du numérique en santé : où en sommes-nous ?


Rédigé par Joëlle Hayek le Lundi 25 Janvier 2021 à 09:30 | Lu 2008 fois


Dévoilée au printemps 2019, la feuille de route du numérique en santé avance à marche forcée, forte de la dynamique collective qu’elle a su initier auprès de l’écosystème. Hospitalia fait le point avec Dominique Pon, le responsable ministériel au numérique en santé.



Dominique Pon, responsable ministériel au numérique en santé. © Florian Garcia
Dominique Pon, responsable ministériel au numérique en santé. © Florian Garcia
La feuille de route du numérique en santé entre dans sa 3ème année. Quel bilan en tirer à ce jour ?
Dominique Pon : En effet, après une année 2019 placée sous le signe de la concertation pour poser une vision et un cadre de valeurs autour desquels l’écosystème e-santé pourra s’aligner – c’était d’ailleurs notamment là l’objet du Tour de France du numérique –, l’année 2020 a été celle de la mobilisation et de la mise en œuvre collective. Tous les acteurs, publics comme privés, nationaux comme locaux, se sont engagés avec beaucoup d’énergie derrière la feuille de route du numérique en santé pour suivre le calendrier annoncé, ce qui nous a permis de tenir nos engagements malgré la crise sanitaire. Nous pourrons donc, en 2021, récolter les fruits de cette mobilisation générale en commençant à travailler, de manière très concrète, sur les usages. 2021 seradonc une année décisive qui viendra capitaliser sur les avancées de 2020avec, notamment, un chantier prioritaire, celui du numérique au service du citoyen : la e-santé doit pénétrer dans toutes les maisons pour préparer l’arrivée de l’Espace Numérique de Santé (ENS), dont la généralisation est prévue au 1erjanvier 2022.

Quelles ont été les grandes réalisations de l’année 2020 ?
Nous avons mené à bien plusieurs chantiers majeurs, comme l’opposabilité des référentiels de sécurité et d’interopérabilité, la mise en œuvre de l’outil « Convergence » pour que les éditeurs puissent auto-évaluer la conformité de leurs outils, l’ouverture du Serveur Multi-Terminologie et de l’espace de test de l’interopérabilité, le déploiement massif des messageries sécurisées dans le secteur du médico-social, l’accélération du déploiement de la carte e-CPS, la passation de marché pour le « store » de l’ENS, le lancement de G_NIUS – le guichet national de l’innovation et des usages en santé –, la finalisation des enquêtes menées en partenariat avec l’Institut OpinionWay pour sonder les Français sur le e-santé, … Il est difficile de tous les citer !

Ce n’est en effet là qu’une infime partie des projets qui se sont concrétisés ces derniers mois.
Nous pouvons également évoquer les dizaines de milliers de requêtes envoyées au téléservice INSi par les établissements de santé et les industriels qui ont commencé à implanter l’Identifiant National de Santé (INS), le lancement de 132 projets « e-Parcours », la sélection d’une dizaine de lauréats pour l’appel à projets « Structures 3.0 » ciblant le secteur social et médico-social, l’organisation des Assises citoyennes et de la cérémonie des « Talents de la e-santé » ou encore la publication de tous les livrables attendus sur l’éthique du numérique. Toutes ces réalisations sont à mettre au crédit de l’écosystème dans son ensemble. Je n’aurai jamais osé rêver d’une telle dynamique collective il y a seulement deux ans !

Cet alignement des acteurs publics et privés est d’ailleurs aujourd’hui inédit, quel que soit le secteur d’activités. Pouvez-vous nous donner quelques exemples ?
La mobilisation est effectivement spectaculaire. Prenez la charte « Engagé pour la e-santé », ratifiée fin novembre par 363 industriels. Cela est suffisamment rare pour être souligné : dans quel autre secteur les acteurs privés se sont-ils engagés aussi massivement auprès de l’État ? La crise sanitaire a d’ailleurs véritablement mis en lumière cette mobilisation collective : dès le mois de février 2020, tous, publics comme privés, ont déployé une énergie incroyable pour mettre en place des services numériques utiles à la prise en charge du Covid-19. SI-DEP, l’outil qui permet de renseigner en temps réel tous les tests RT-PCR de France afin de suivre l’épidémie et de déclencher le contact tracing, a par exemple été mis sur pieds en trois semaines seulement. 

L’agilité a donc été ici de mise.
Nous avonsen effet assisté à des initiatives fantastiques, pour faciliter les téléconsultations, accélérer l’identification des cas contacts, mieux identifier les besoins en équipements et en masques au sein des établissements de santé, etc. Alors bien sûr, beaucoup de choses auraient été plus simples si la feuille de route du numérique en santé n’avait été à mi-chemin. Mais les exploits n’en ont pas moins été nombreux, faisant de la France un pays à la pointe du suivi épidémiologique en temps réel. L’épidémie a agi comme un accélérateur sur certains projets, comme e-CPS, dont le nombre a explosé depuis la montée en puissance de tests antigéniques et leur saisie dans SI-DEP. D’autres projets ont évolué, comme G_NIUS qui a rapidement intégré un volet Covid afin de faciliter le financement et le référencement de services numériques dédiés à la lutte contre le Covid. D’autres, enfin, seront lancés au fil des besoins, comme VAC-SI, l’outil qui viendra outiller la future stratégie de vaccination.

Vous l’avez dit, la situation aurait pu être différente si la crise avait eu lieu en 2022, au terme du virage numérique, plutôt qu’en 2020. N’est-ce pas là un indicateur qu’il nous faut accélérer encore le mouvement ?
Oui, et c’est justement ainsi qu’il faut considérer les 2 milliards d’euros supplémentaires attribués à la e-santé dans le cadre du Ségur. La mobilisation générale autour d’une feuille de route partagée, l’énergie sans faille dont l’écosystème a fait preuve, ont permis d’obtenir la confiance du gouvernement en notre capacité à mettre cette stratégie en œuvre conjointement. L’investissement historique alloué à la suite du Ségur offre de nouvelles opportunités pour accélérer et généraliser l’échange et le partage sécurisés des données de santé. L’alignement des outils métiers avec les services socles prioritaires – INS, DMP (Dossier médical partagé), MSS (messagerie sécurisée de santé) à destination des professionnels de santé et des citoyens, portail d’authentification Pro Santé Connect, etc. – se poursuit aujourd’hui à vitesse grand V, même si ce travail de l’ombre est encore peu visible. Il ne représente d’ailleurs qu’une première étape, certes fondamentale, mais dont les bénéfices ne seront véritablement perceptibles qu’avec le développement des usages. Ce sera là notre prochain défi, peut-être le plus complexe. Mais je suis persuadé que nous parviendrons à franchir ce cap.

Quels seraient ici les points de vigilance ?
La feuille de route du numérique en santé s’inscrit dans une stratégie plutôt inédite. Les changements structurels, en France, se mettent habituellement en place en réaction à quelque chose. Ce n’est pas le cas avec la e-santé aujourd’hui puisque la dynamique à l’œuvre est née d’une envie partagée, celle de nous réunir autour de valeurs communes et d’avancer tous ensemble dans la même direction, avec une vision, une cible et un horizon clairement définis. Mais ce mouvement est encore à ce jour celui de l’écosystème. La e-santé est toujours une affaire d’experts, il nous faut en faire un objet visible du grand public.Nous devrons faire preuve ici d’humilité comme de confiance, franchir les étapes les unes après les autres, et ne pas nous décourager au moindre grain de sable qui viendrait enrayer la machine. Ceci dit, je suis convaincu que tant que nous demeurerons sincères sur nos valeurs – un numérique humaniste, citoyen et éthique, mais aussi sécurisé et souverain –, tant que nous ne les travestirons pas, nos concitoyens y adhèreront également et nourriront, eux aussi, cette énergie et cette dynamique collectives. 

Le mot de la fin ?
Ce n’est qu’ensemble que nous réussirons.Cette vision est peut-être quelque peu romantique, mais elle n’en est pas erronée pour autant. Et d’ailleurs tous les acteurs, publics comme privés, semblent y souscrire, puisque nous sentons une réelle solidarité sur le terrain. Je ne peux que saluer cette implication globale, qui a permis de donner une nouvelle visibilité à la France sur les plans européen et international. De nombreux pays observent aujourd’hui avec beaucoup d’attention la mise en œuvre de la feuille de route du numérique en santé, ce qui a poussé la Délégation au Numérique en Santé (DNS) à recruter un expert Europe et International afin de justement positionner notre pays comme un champion de la e-santé. Le mot d’ordre de la feuille de route, « En France, la e-santé ça avance ! », n’a jamais été aussi vrai.

 
Article publié sur le numéro de décembre d'Hospitalia à consulter ici.
 
 

 
 






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